De Trabzon, nous avons découché une fois pour aller dans un village
montagnard, Ayder. Super route à travers la montagne, qui cette fois nous offre
des plantations de thé. Pas le moindre espace sans ces buissons rapprochés qui
donnent aux pentes un petit air froissé, festonné. Et puis ça et là, comme
tombés du ciel des femmes (des hommes beaucoup plus rarement) sont fichées
jusqu’à mi-cuisse ou à la taille dans cette ondulation verdoyante et ramassent
les feuilles de thé en secouant les buissons dans des sacs posés sur les
arbustes et qui semblent flotter. Nous sommes excités par cette sortie à la
montagne.
Logement dans une
vétuste et sombre baraque en bois sombre qui fait peur aux enfants, frayeur
accentuée par la brume qui remonte de la vallée et obscurcit bien vite
l’endroit avant la tombée attendue de la nuit. Nous sommes seuls avec le
gérant, jouons aux cartes dans la pièce du bas chauffée par un poêle dont le
tuyau fuit, obligeant à ouvrir la porte car la fumée envahit le salon. Très
bonne nuit en définitive des minots, engoncés sous leurs couettes qui en
redemandent dès le réveil.
Le bruit du torrent derrière la maison est continu.
Le soleil nous réveille tôt et nous partons nous balader vers les inatteignables sommets
enneigés. Juste le bonheur d’escalader les rochers le long du torrent et
remonter les pâturages.
En haut, on aperçoit une femme un enfant sur le dos.
Nous la rejoignons rapidement. Elle nous invite chez elle à manger. Nous nous
installons dans la pièce unique, pas très à l’aise, faut bien l’avouer. Mehmet,
2 ans, fait le fanfaron. La femme prépare une fondue de fromage sur le poêle et
le thé chauffe aussi. Les odeurs sont fortes, de fromage, et aussi de vache. La
famille a 4 vaches, un potager devant la maison, quelques ruches. La femme a 26
ans, son visage, édenté, lui donne pas mal d’années en plus. Elle nous sert du
beurre maison et une sorte de crème fraiche solide. La fondue est super bonne,
Maolann, qui a des haut-le-cœur, n’en prend pas. Le beurre est salé et Phanie a
du mal à manger la crème. Jade boit son verre de thé en entier et Louna prête
sa montre à Mehmet pour jouer. Nous achetons une paire de chaussettes tricotée
par la femme et prenons congé après ces 3/4 d’heures incroyables,
impressionnants et émouvants.
En descendant
nous croisons un serpent plutôt long mais plutôt mort et avons la chance
incroyable de voir deux ours, jeunes, sur le versant opposé, nous les
observons, de loin, un bon moment.
Retour en bus, nous planons tous les cinq
après cette journée intense, Louna bouquine, Phanie Maolann et jade jouent aux
cartes, je contemple, le soleil inonde la côte, des milliers d’étoiles dans la
Mer Noire. Le contre jour des bateaux de pêche et des tankers les dessinent à
l’horizon.