L’accueil dans
l’hôtel n’est pas très chaleureux et on s'en veut d’avoir en continu cette
petite pression. Nous sommes en Iran dont la seule notion dont on dispose est
l’image renvoyée par tous les médias du monde, un pays d’extrémistes. Pourtant
nous sommes venus ici car savons que la réalité du terrain n’est pas celle là
mais c’est très difficile de se débarrasser du cliché qui colle à la peau du
mot Iran. C’est la rue qui va faire le boulot. Les gens sont extraordinaires.
Nous sommes regardés comme une attraction. Beaucoup de personnes viennent nous
demander d’où nous venons et sourient en voyant les enfants. Plusieurs viennent
nous souhaiter la bienvenue en Iran et
s’entretenir avec nous. Un étudiant en littérature française, accompagné
d’un ami et de sa copine, nous dit à quel point il voudrait venir en France, à
quel point les jeunes voudraient que la situation change ici mais ne savent pas
comment faire (« ils nous bloquent »). Ils savent très bien l’image
donnée de l’Iran à l’étranger. Désespéré aussi par le service militaire
obligatoire de 18 à 20 ans (« ils nous prennent les 2 plus belles années
de notre vie »). Nous faisons des photos et reprenons notre chemin vers la
mosquée bleue.
L’intérieur est
baigné des rayons du soleil et la lumière est magique. Nous y restons assez
longtemps car nous y sommes bien, tous les 5. Rencontre avec un
jeune ingénieur :il nous dit que 70% des jeunes ne
croient pas en dieu et nous assure que dans 3 ans, "c’est un secret", il y a aura
un printemps iranien. En sortant, nous croisons Mohammed, graphiste, avec qui
nous discutons assez longtemps: nous finissons par aller diner avec lui chez sa soeur le soir même.
Le matin, nous
avions eu beaucoup d’informations au point info touristes par Nasser. Il a vécu
10 ans en France et est enthousiaste. Il balaie nos craintes concernant les
élection présidentielles du 14 juin en disant que le contexte n’est pas le
même, que les touristes n’ont rien à craindre, que les iraniens ne sont pas des
talibans. Il semble assez agacé de l’image que l’on renvoie de son pays et
contribue un peu plus à notre apaisement interne déjà bien entamé par les
rencontres multiples et visites du jour . Il ajoute aussi, ce qui sera
redit par d’autres (et contredit aussi), que Louna n’a pas besoin de foulard.
Visite du
bazar couvert en deux fois. Des milliards de pistaches de tailles et variétés
différentes, des odeurs incroyables et l’impression qu’il y a encore plus de
trucs que dans les bazars turcs. Le batiment qui abrite le bazar est super
beau, nous reviendrons regarder tout cela de près. Visite le sur lendemain,
vendredi : C’est jour de prière et quasiment tout est fermé. Nous nous
retrouvons genre Grosjean comme devant mais pas tout à fait car nous pouvons
profiter du grand vide des allées pour mieux voir les puits de lumière tombés
des toits aux arches multiples, en briques de petite taille. Nous pourrions
nous perdre dans ce dédale sans
avoir peur du grosjean méchant loup.
Visite aussi
d’un village (kandovan) à 15 km de Tabriz, genre Cappadoce miniature, qui ne laissera pas
beaucoup de souvenirs ; quand on vient de Turquie on fait son craneur et on
dit bof devant les pâles immitations de la Cappadoce encore bien gravée dans
nos âmes misérables.
A 21 heures 30
Mohammed vient nous prendre en voiture à l’hôtel et nous nous rendons donc chez
sa sœur. Nous arrivons dans un grand appartement, immense séjour recouvert de
tapis, quelques fauteuils assez rococcos comme nous avons vus pas mal en vente
dans Tabriz. La sœur de Mohammed, la soixantaine, son fils de 40 ans et sa
femme, la femme de Mohammed nous accueillent comme si nous nous connaissions
depuis 20 ans. Nous dinons à même le tapis moelleux sur une nappe en plastique
fin à usage unique. Soupe de légumes et graines de barberries (rouges, sucrées,
vendues en vrac avec les épices et fruits secs et incorporées fréquemment dans
les plats iraniens) dont nous récupérons la recette, espèces de samosas puis
pastèque, fraises, concombres (ici mangés comme fruits). Les enfants se marrent avec les jumeaux
de Mohammed de 9 ans et leur cousin du même âge. Super soirée où Phanie est
invitée à enlever son foulard (ce que ne font pas les autres femmes). Nous
buvons du thé à la cannelle. A minuit et demi Mohammed nous ramène à l’hôtel,
après nous avoir offert un livre sur la ville de Tabriz. Nous sommes comblés la
soirée a été heureuse à la fois pour nous et pour les enfants enchantés.
Mohammed, qui voudrait tisser des liens entre tous les hommes, est assez ému.
Le lendemain,
thé dans d’anciens bains réaménagés, underground organisé autour d’une fontaine
intérieure. En Iran, le thé est servi non sucré. Les gens prennent des morceaux de
sucre entre les lèvres, jouent un peu avec puis boivent le thé qui vient se
sucrer dans la bouche.
Un taxi nous
emmène à la gare et au moment de le payer nous nous apercevons que ce n’est pas
un taxi mais juste un mec qui nous rend service et refuse l’argent proposé….
Nous prenons le
train de nuit jusqu’à Téhéran.